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Élus et citoyens main dans la main pour des « communes vertes » en Bourgogne
Sud Bourgogne
Le territoire du Sud Bourgogne, zone d’influence historique de la ville de Cluny, est avancé dans sa transition environnementale grâce à l’esprit d’initiative de certains de ses élus et de ses habitants. Zoom sur la vie dans ces localités qui investissent dans leur transition énergétique.

Tramayes, une dizaine de kilomètres à l’ouest de Mâcon et au sud de Cluny. Un peu plus de 1 000 habitants, une église du XIIème siècle, une boulangerie et un bistrot. A priori, rien ne semble différencier cette commune d’une autre. Pourtant, cette municipalité produit plus d’énergie renouvelable qu’elle n’en consomme. En 2006, plusieurs installations au fioul sont remplacées par une chaufferie municipale à bois, qui « permet de ne pas brûler 200 000 litres de fioul par an pour la commune », précise le maire, Michel Maya. Ce changement « nous a mis le pied à l’étrier du développement durable », se félicite l’élu sans étiquette. Premier édile depuis 1995, il entend montrer au plus grand nombre que la transition est « faisable » et inspirer ses concitoyens. 

La commune de Tramayes dans le sud de la Bourgogne, exemplaire dans sa transition énergétique

La commune fait donc tout pour être exemplaire, en misant sur la sobriété, la réduction des consommations, la rénovation énergétique et en ajoutant au dispositif de chauffage des panneaux photovoltaïques sur tous les bâtiments municipaux. Pas tout à fait assez cependant pour convaincre Jean-François, militaire à la retraite, attablé au bistrot : « La chaufferie par exemple, c’est pas encore idéal », remarque-t-il, soulignant que le bois brulé, s’il vient d’une scierie toute proche, est traité avec des produits chimiques pour l’empêcher de pourrir. Plus loin, à la sortie de la supérette, Olivier, entrepreneur en menuiserie, déplore de son côté que ces travaux se fassent au détriment « d’une salle de sport ou de travaux de voirie, qui n’est plus en état ». Didier, enseignant, regrette que la transition soit « devenue une obsession » même si « de bonnes choses sont faites ». « J’étais sceptique quand ils ont coupé l’éclairage de nuit, mais maintenant tout le monde s’y met », concède-t-il.

La transition dépendante de la relation élus-citoyens

Marie-Thérèse, retraitée, est plus positive. Elle souligne l’impact « bénéfique » de ces installations : « Pour une commune de cette taille, c’est beaucoup ». Il y a certes des points de crispation, mais une partie « importante » des habitants est en faveur de la politique énergétique menée par la mairie, estime Béatrice, banquière dans la commune depuis dix ans. Même si, dans les faits, « peu [de citoyens] sont investis » et que « cela ne change pas grand-chose à nos vies au quotidien ». 

Michel Maya, maire de Tramayes en Bourgogne. Sa mairie a récemment été rénovée pour améliorer ses performances énergétiques. (Photo : Mathieu Ollagnier)

Sur le parvis de la mairie, qui vient d’être rénovée largement au-delà des normes énergétiques en vigueur, Michel Maya, explique être engagé dans une démarche de « Territoire à énergie positive (TEPOS) », basée sur quatre piliers : l’efficacité énergétique, la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la diminution de la consommation d’énergies fossiles et le développement des énergies renouvelables. 

Du côté financier, le coût de l’ensemble des installations à caractère énergétique réalisées par la mairie sous le mandat de Michel Maya s’élève autour de huit millions d’euros, pour un millier d’habitants. 1,6 millions pour la chaufferie, 2,2 pour le groupe scolaire, 1,7 pour l’ancienne gendarmerie… Une grande partie, autour de 40%, est prise en charge par des subventions de l’État et de la région, une autre par les gains de loyers ou de facturation d’énergie. Enfin, une dernière est financée par les impôts communaux. « Le tout sans aucune hausse du taux de fiscalité communal [pour les habitants] depuis 1995 » se félicite le maire. 

Une soixantaine de logements de particuliers sont reliés au chauffage à bois de Tramayes et n’ont ainsi pas subi l’augmentation des cours de l’énergie. Pour l’édile, il est capital d’avoir un impact positif direct sur les citoyens : « Pour les motiver à s’engager ». Et d’ajouter : « Sans eux, rien de tout ça ne sera possible, eux seuls peuvent changer les choses à leur échelle personnelle ». D’autant, remarque-t-il au sujet du territoire du Sud Bourgogne, qu’« on a la chance d’avoir un tissu associatif sur lequel s’appuyer et quelques habitants engagés pour montrer l’exemple ».  

Un territoire riche en associations 

Cluny bénéficie d’un tissu associatif particulièrement dense : « Pour 14  000 habitants, on a 650 associations actives », se félicite le président de la Communauté de communes, Jean-Luc Delpeuch. Ce petit territoire rural, qui compte pour moins de 3% de la population du département de Saône-et-Loire, concentre 8% des associations.

Un avantage certain pour les élus locaux : « On a très peu de moyens financiers […] mais si on sait bien travailler avec ces associations, c’est toute la richesse du bénévolat qui se met en mouvement », se réjouit le président, depuis ses depuis ses nouveaux locaux clunysois. La Communauté de communes travaille par exemple de pair avec « La vie-cyclette en clunisois » sur la formation et le financement pour « apprendre la pratique du vélo et sa réparation », avec l’objectif affiché de permettre un déplacement sain et autonome sur le territoire. 

Centrale Villageoise Soleil Sud Bourgogne, une autre association active pour la transition énergétique, passe des contrats avec les collectivités territoriales comme la Communauté de communes de Cluny pour installer des panneaux photovoltaïques à ses frais. Sa présidente Laurence Boubet, jointe par téléphone, précise que le travail en coopération est la clef pour construire son réseau de toiture : « On pose des panneaux chez les particuliers et aussi les bâtiments publics, qui disposent de plus grandes toitures en général ». Pour cela, elle a besoin d’élus et de citoyens actifs et volontaires, ce qu’elle dit trouver « sans trop de problème ». 

Cette entraide pour la transition énergétique est à double sens. Le CLER, Réseau pour la transition énergétique, est une association qui épaule les structures qui souhaitent s’investir dans la transition. Son antenne locale a par exemple permis, en coopération avec la Communauté de communes de Cluny, de bâtir la « Ludoverte », une ludothèque positive en énergie. Adossée au pilier vert pomme de l’entrée, Anne Auclair, responsable de projet au CLER pour le territoire Sud Bourgogne développe : « Nous aidons par notre réseau, nos conseils et notre publicité les localités qui souhaitent avancer dans le domaine de la transition verte ».

D’autres communes du territoire Sud Bourgogne, comme la ville de Matour, 15 kilomètres plus au sud, sont adhérentes au CLER.

Françoise et Jean-Pierre Martinez, citoyens engagés dans la transition énergétique, à l’entrée de leur maison à Matour en Bourgogne. (Photo : Mathieu Ollagnier)

C’est dans cette même commune que le couple Martinez, la quarantaine, participe activement à la vie associative, ils ont par exemple loué leur toiture à Centrale Villageoise Soleil Sud Bourgogne. Pour Jean-Pierre, professeur en naturologie : « Il y avait un accueil assez ouvert de personnes extérieures, ce qui n’est pas forcément le cas dans toutes les régions ».  Arrivés par hasard dans ce territoire en 2001, ils n’en partiraient aujourd’hui « pour rien au monde ».